perception
26 septembre 2014 – Business et « mercenaires » : les nouvelles perceptions
La sémantique évolue en même temps que les situations géopolitiques. Deux revues françaises de bonne tenue ont, cet été, ouvert des dossiers sur des thématiques qui d’ordinaire intéressent peu nos concitoyens, mais qui se révèlent cependant emblématiques des nouveaux enjeux. Le très non-conformiste et brillant trimestriel de géopolitique, Conflits, récemment lancé par Pascal Gauchon, a consacré son second numéro au thème Les nouveaux mercenaires, avec une analyse réaliste du rôle que jouent les sociétés militaires privées (SMP). Dans le même temps, Défis, la pertinente revue de l’INHESJ (Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice), sous l’égide de Cyrille Schott et d’Eric Delbecque, se penchait, pour son second numéro elle aussi, sur la question du Business en milieu hostile : la protection des entreprises à l’international. Deux approches différentes, avec des intervenants de grande qualité, pour une même préoccupation : comment défendre nos intérêts sur une scène internationale toujours plus mouvante et violente ? Au contraire des apparences, la question n’est pas que d’ordre technique. Elle intègre des paramètres liés à la perception des situations. En l’occurrence, les mots que l’on emploie, les messages que l’on répercute, les images qui sont perçues ne sont pas innocents. Les stratégies de communication d’influence accompagnent ici nécessairement les actions sur le terrain de ceux qui ont en charge la protection de nos intérêts dans des zones à hauts risques. Lire la suite
25 octobre 2013 – Beyrouth, 23 octobre 1983 : l’attentat contre le poste Drakkar. Une vie du hard power au soft power…
Il arrive fréquemment que l’on me demande quand est née ma réflexion sur l’influence et plus généralement le soft power. Invariablement, je réponds : « À Beyrouth, le 23 octobre 1983« . Autrement dit quand le poste Drakkar fut la cible d’un attentat terroriste qui tua 58 parachutistes français. Nous venons avec tristesse d’en honorer le 30ème anniversaire. Précisons l’ampleur du désastre. Car un autre attentat, deux minutes plus tôt, avait tué 241 marines américains retranchés dans l’aéroport de Beyrouth. A cette question sur la gestation d’une réflexion personnelle sur l’influence, réponse directe. Réaction immédiate. Mes interlocuteurs sont en général médusés. Médusés d’une part d’apprendre que j’étais alors jeune officier présent sur place (au nord de Drakkar, rue de Verdun, ça ne s’invente pas !), et que j’avais participé au sauvetage des survivants, puis aux missions qui se déroulèrent alors à Beyrouth ouest. D’autre part, de constater que, d’un événement aussi violent, avait pu naître une réflexion sur l’influence. Car le jeune lieutenant des parachutistes d’Infanterie de Marine que j’étais alors avait compris d’emblée que le hard power ne pouvait pas grand-chose dans la nasse de Beyrouth. Et que si nous étions condamnés à en sortir piteusement, c’était par déficit stratégique, inadaptation à la mission (pas de cadre politique et juridique clair), et altération flagrante de la perception par les opinions publiques occidentales. Les Américains avaient beau avoir des norias d’hélicoptères, le New Jersey pouvait bien tirer des obus de marine, le hard power n’était que de peu de secours dans une poudrière comme Beyrouth. D’où l’idée qui germa alors dans mon esprit – de manière minuscule, un chef de section a, en la circonstance, bien d’autres chats à fouetter ! –d’engager peu à peu une réflexion sur le soft power, notamment en mettant en relief le jeu des idées dans les stratégies d’influence. La puissance de l’esprit et la force des idées sont toujours supérieures sur le long terme à la brutalité et l’actualité. Encore faut-il pouvoir penser le long terme… Lire la suite
16 juillet 2013 – La Légion étrangère, vecteur de rayonnement géopolitique
Comme chaque année lors du défilé du 14 juillet, la Légion étrangère, descendant de son pas lent l’avenue des Champs Elysées, a remporté un vif succès auprès des spectateurs. Cette troupe d’élite, unique au monde, créée par le roi Louis-Philippe en 1831, fêtait cette année le 150ème anniversaire de la bataille de Camerone. Perpétuant ses traditions, la Légion reste en totale symbiose avec notre monde moderne. Le Général de Saint Chamas, actuel commandant de la Légion étrangère, avait d’ailleurs accordé en avril dernier un entretien à Communication & Influence, mettant en relief la manière dont s’articule hard et soft power au service du rayonnement de notre pays. Dans la foulée, l’ESC Grenoble, par la voix de son directeur Jean-François Fiorina, est allé interviewer le Général de Saint Chamas pour recueillir son sentiment sur ce que pouvait être l’appréhension géopolitique de la Légion. « La géopolitique de la Légion, c’est d’abord la géopolitique des hommes » a-t-il répondu, dans un entretien qu’il est utile de découvrir. Car au-delà du redoutable outil de guerre, la Légion constitue aussi un modèle qui pèse en termes d’influence. Lire la suite
03 avril 2013 – Le crime organisé entre fiction et réel
Le crime organisé et les mafias usent des techniques de la communication d’influence pour nourrir leur propre mythologie. Ce constat émane d’un spécialiste qui les connaît bien, le commissaire Jean-François Gayraud, auteur de nombreux ouvrages sur la question, (voir en particulier le dernier, co-écrit avec François Thual, Géostratégie du crime, Odile Jacob, 2012). Dans un entretien sans langue de bois accordé à Jean-François Fiorina, directeur de l’ESC Grenoble, dans le cadre des notes mensuelles de géopolitique (CLES – Comprendre les enjeux stratégiques), il souligne : « Le système, pour des raisons économiques et culturelles, intègre le crime dans le paysage. Ce qui revient symboliquement à le banaliser. Hollywood vend du divertissement, il faut attirer le spectateur. Or la vision de la mafia délivrée en fait un mythe, mythe qui vient rétroagir sur le réel. La fiction ne se nourrit pas du réel, c’est le réel qui se nourrit de la fiction. Le paradoxe est que les récits mythifiés délivrés par le cinéma ou la littérature concernant la mafia, finissent par nourrir la mythologie des criminels eux-mêmes. » Lire la suite